Naufrageurs ou pilleurs d’épave, voici une image peu flatteuse qui pourtant, à une certaine époque, pouvait désigner une partie de la population côtière qui profitait d’une manne offerte par l’océan.
Il y a eu 240 naufrages identifiés sur la côte landaise entre 1582 et 1918.
Droit de naufrage
Au XVIIe siècle, il existait même un droit de naufrage. Il découle du naufrage d’un galion portugais au large des côtes en 1626, et dont la riche cargaison aurait comblé un certain cadet de Gascogne qui la revendiquait. La légende raconte aussi qu’un bateau, « Le Moïsan », ancré au fond d’une lagune salée pour laisser passer la tempête du 28 octobre 1578, n’a jamais pu regagner la mer, faute du retour des eaux de l’Adour, détournées à Bayonne. L’épave du « Moïsan », échoué, pourri au fond du lac de Messanges. Le 13 janvier 1887, le « Renown », un cargo charbonnier, s’échoue au large de Contis. Il y a aussi le « Cazengo », un cargo portugais torpillé par les Allemands. Il coule avec des centaines de barriques de nectars (porto, madère et malaga) le 8 octobre 1918.
Le Cazengo, navire à vapeur portugais faisant parti d’une petite flottille de 5 bâtiments de commerce escortée d’une canonnière, quitte la baie de Saint Jean de Luz et fait route vers le port de la Pallice à La Rochelle en Charente Maritime.
Nous sommes le 8 octobre 1918, la fin de la guerre est proche mais le navire est torpillé par un sous-marin allemand, éventré par bâbord et stoppé net dans sa course.
De cette tragique histoire allait naître des anecdotes cocasses dans le Pays du Born et le Marensin...
En effet, quelle surprise lorsque le 10 octobre on découvrit la cargaison, essentiellement composée de barriques de Porto, échouée sur la côte Mimizannaise et ce jusqu’à Saint Girons. On retrouva sur la plage un nombre incroyable de fûts, certains parlant de 600 et d’autres de 1000 barriques.
« Le sauvetage des fûts de Porto »
La nouvelle fut vite répandue, et pendant les 3 jours qui suivirent le naufrage ce fut la ruée vers « la mer » ; les riverains accoururent sur la plage munis de seaux, d’arrosoirs et autres contenants.
Il régnait une véritable atmosphère de fête, de rires, de chants et de danses… Il y avait au choix Porto blanc ou rouge.
Les gens s’empressèrent d’ouvrir ces fûts par tous les moyens. Ils firent des trous ou les ouvrirent à coup de hache, et certains laissèrent même les fûts qui n’étaient pas à leur goût de côté. D’autres essayèrent de remonter la dune tant bien que mal (après avoir goûté ce nectar délicieux) pour cacher les barriques en forêt et revenir ainsi plus tard avec des charrettes, des mules ou des chevaux ; mais ironie du sort certains voleurs étaient à leur tour volés !
En revanche certains n’y parvinrent pas - les barriques étant trop lourdes et volumineuses, si bien que ces « pirates des terres » ne purent les retenir et les virent finir leur course de la dune vers la plage, parfois totalement éclatées.
Ce n’est que le troisième jour du naufrage que des agents des douanes accompagnés de gendarmes firent leur apparition, laissant ainsi tout le temps à chacun de s’approvisionner en Porto et de cacher la plus grande partie de cette trouvaille.
On dit qu’un mois après le naufrage du Cazengo, des bouteilles de Porto attendaient les Poilus pour fêter leur retour. Beaucoup de familles se servirent des bouteilles de Porto de ce fameux naufrage pendant plusieurs années pour les grandes occasions, et certains en conserveraient encore !
Autre compte rendu :
Nous sommes un mois avant l'armistice de la Grande Guerre